La construction de l’identité professionnelle de l’art thérapeute Dominique Sens

La construction de l’identité professionnelle de l’art thérapeute Dominique Sens / Cairn
Psychologue clinicien, Art thérapeute
Chargé de cours université Paris-v

Si l’intitulé art thérapeute est explicite, l’on s’interrogera plus spontanément sur la situation psychothérapique de l’art thérapeute vis-à-vis des autres disciplines existantes. En effet, il existe une diversité de définitions de l’art thérapie qui renvoient à différents modèles théoriques (psychanalytique, systémique, cognitivo-comportemental, etc.). En ce sens, l’évidence du devenir du métier d’art thérapeute est mise à l’épreuve.
L’art thérapie est actuellement en pleine extension. Elle fait l’objet d’une visibilité institutionnelle par son utilisation de plus en plus courante dans les secteurs psychiatrique, médico-éducatif, du handicap mental, de la gériatrie et par sa diffusion tant sur le plan de la formation universitaire (DU, master) qu’extra-universitaire (diplômes privés, certificats de formation). Phénomène de moins en moins marginal, l’art thérapie se déploie également en tant que pratique psychothérapique en cabinet libéral. Ainsi, l’idée d’un traitement psychothérapique par l’art thérapie fait son chemin actuellement, mais il n’existe pas encore un véritable statut comme en Angleterre, encadré par une formation de niveau « master », l’obligation d’être enregistré régulièrement auprès d’un organisme officiel pour pouvoir exercer et la nécessité d’un contrôle (supervision) pour le clinicien, surtout si celui-ci reçoit des enfants.
3 Par ailleurs, la question de la psychothérapie soulève un débat important et pose l’interrogation – comme pour toutes les psychothérapies – de la qualification et de la formation du praticien. Les questions sont nombreuses et sujettes à polémiques. Par exemple, y a-t-il une pertinence à distinguer art thérapie/psychothérapie à médiation artistique ? Une telle distinction correspond-elle à des pratiques différentes et ordonne-t-elle une certaine position psychothérapique ou bien relève-t-elle d’une séparation arbitraire liée à des enjeux autres que cliniques ? Peut-on parler de dispositif d’art thérapie analytique et à quelle condition ? Et, dans ce cas, faut-il être psychanalyste ? Un psychologue clinicien formé à l’art thérapie et bénéficiant d’un contrôle par un analyste peut-il s’autoriser à : « inventer d’autres dispositifs praticiens compatibles avec la théorie psychanalytique » ? (Vacheret C., Duez B., 2004, p. 194.)
Je me propose d’aborder la problématique de l’identité professionnelle de l’art thérapeute en termes de construction, c’est-à-dire en considérant qu’il s’agit là d’un processus où l’individu construit son identité dans la similitude et la différence à autrui, dans une appartenance à un groupe et en lien avec une pratique sociale. L’art thérapeute est donc pris entre une recherche de stabilité au travers de repères qui sont autant d’éléments partageables, fondateurs de son identité professionnelle, et la nécessaire singularité d’une pratique qui en fait un sujet autonome.
5 La construction de l’identité de l’art thérapeute est une question complexe qui va s’articuler autour de différents niveaux de compréhension. Un niveau individuel, relatif au désir d’être du sujet et du projet personnel qui le porte. Un niveau groupal qui renvoie à la question de l’affiliation à un groupe d’appartenance revendiquant une certaine place dans le champ de la pratique de l’art thérapie. Enfin, un troisième niveau, sociétal, pourrait-on dire, en référence à la position qu’occupe cette pratique de l’art thérapie, produit d’une histoire et pratique sociale évolutive, elle-même tributaire de représentations sociales structurées par des normes, des règles, une idéologie véhiculée par la société libérale postindustrielle.

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